mercredi 26 mars 2014

Sex and the office


On ne vit pas dans une série télé, je le sais. Je m’en rends compte tous les jours, à mon grand désarroi parfois, car quoi qu’il arrive, les héroïnes de séries s’en sortent grandies. Moi… pas vraiment, pas (assez) souvent.
Et d’autres non plus apparemment.

J’interviens dans un Groupe Français, très français, pas très petit, très caricatural : un Directeur Général la soixantaine bien portante qu’il entretient en venant en vélo délaissant son chauffeur, 5 Directeurs Généraux ventripotents, sauf le plus jeune qui a aborde la cinquantaine avec juste des poignées d’amour qui vont avec son nom d’aristocrate, 15 directeurs-tout-court et enfin, à ce niveau-là quatre femmes.

C’est un Groupe Français dans lequel on fait carrière, on y est bien traité, bien français (agapes et bonne chair), pas un mot d’anglicisme dans le vocabulaire ce qui les a bien dérangés quand ils ont reçu le label « Top Employer » qu’ils n’ont pas pu francisé.
Et donc après « bonne bouffe, bon vin… » qu’est-ce qui vient dans le paysage français ?
Le cul, en français.
Sex @ the office.

Ceux qui savent compter : 4 femmes, 17 hommes, combien de possibilités ?
Je précise que c’est « vieille France » donc pas de threesome, ni de relation homosexuelle : en somme c’est comme dans Mad Men, juste de la bonne vieille adultère très classique, de l’homme de pouvoir qui couche, et de la femme qui assure son ascension sociale : promotion canapé on appelait cela chez nous, avant (avant vraiment ?).

Là où les choses se compliquent dans mon affaire, c’est quand la femme résiste au Tout-puissant, et choisit de coucher avec un des Saints plutôt qu’avec Dieu.
Si Dieu était Dieu, il serait magnanime et pardonnerait volontiers, en choisirait peut-être une autre, et serait heureux du bonheur de ces deux-là.
Mais Dieu est humain, donc jaloux et rancunier, et comme il est puissant, il peut nuire, et il choisit de le faire à petit feu.

Dois-je préciser qu’en dehors du bureau, tout ce petit monde est marié ? Avec enfants et pas divorcé.

A un moment cela devient triste : la femme du Saint choisit d’écrire une lettre, digne paraît-il, à Dieu pour dénoncer, expliquer, signifier, souligner… quoi au juste l’amour ? l’adultère ? la relation ? la douleur ? le non-professionnalisme ? …la situation que son (encore) mari entretient avec une de ces collaboratrices directes. Elle donne les noms de tout le monde dans cette lettre, qu’elle imagine destinée à Dieu exclusivement. 

« Madame, avez vous oublié comment fonctionne une entreprise ?
Tout ce qui est censé être confidentiel est largement publique (et l’inverse est aussi vrai). Je connaissais, moi, la liaison de votre mari avant même de l’avoir rencontré lui, ou sa collaboratrice. »

Dans le contexte où le Groupe Français se rapproche d’une autre Grand Groupe Français pour faire un Très Grand Groupe Français, une telle histoire si elle était reprise par les médias ou les syndicats déstabiliserait peut-être Dieu pour ne pas avoir supprimé les pommes de son jardin, en tout cas ses Saints qui ne résistent pas à les manger.

Si elle était unique dans ce Groupe Français, cette histoire s’apparenterait à une histoire d’amour contrariée, et on pourrait en faire un conte dramatique (ou une tarte aux pommes).
Malheureusement elle est commune, elle illustre juste la culture de ce Groupe très Français : « un vrai terrain de chasse » disent certains. Et je vous le concède, le propos est effrayant.

En bonne rationnelle, je me dis que s’il y avait plus de femmes dans ce comité de Direction, on multiplierait les possibilités, on diminuerait ainsi la probabilité d’occurrence du triangle amoureux : s’il y a plus de femmes, plus de choix donc plus de chances de trouver la bonne compagne d’adultère plutôt que de tous miser sur la même.

Voilà encore un argument pour plus d’équilibre homme-femme dans les classes dirigeantes.










samedi 22 mars 2014

L'instant décisif


L'instant décisif, c'est celui de Cartier-Bresson.
Pas le mien.
Je veux juste lui rendre hommage,
A mon niveau, très modeste.
Dans une autre vie,
 - il m'en faudrait d'ailleurs plusieurs -
j'aurai voulu être lui*.

Beaubourg lui offre une nouvelle fois tribune
Rien que pour nos yeux
Où je découvre encore et toujours
Des photos que je n'ai jamais vues
Et où je revois avec intensité
Celles que je connais.



* penser un jour à faire la liste de qui j'aurai voulu être, et m'y atteler.

mercredi 12 mars 2014

C'est ça ma vie?



Avant, il y a longtemps
J’étais capable de traverser Paris
De faire plusieurs changements (de métro)
Inconfortables et longs
Pour aller voir des films comme « un homme sans l’occident »
Oui c’était bien Depardon,
Non ce n’était pas sous-titré
Oui c’était en VO  (un dialecte touareg)
Non je n’étais pas partie avant la fin.
Et circonstances non atténuantes : j’allais souvent au cinéma
Voir de film comme ça.
Et le pire est que j’aimais ça.

Ces deux derniers mois je suis allée trois fois au cinéma.
Avec mon iMari, au cinéma du coin
Choix par défaut de ce qui passait.
On a vu Mathieu Almaric, qui a enfin fini sa thèse
Mais qui est prof de fac.
Le héros de ce film est le bâtiment, magnifique
De l’école polytechnique de Lausanne.

Puis Minuscule, avec les enfants
Choisi pour l’horaire.
On était devant au moment où la séance débutait.
La surprise est le fond : le décor est le Champsaur
Le film a été tourné dans nos montagnes
On se croirait en vacances chez mes parents.

Enfin l’apothéose de ma série
Reste Vampire Academy
Un samedi soir à 19h20,
avec tous les parisiens
qui termine leur shopping à Montparnasse avec une "p'tite toile"
Un film de filles, de jeunes filles avec leur papa ou leur boyfriend
Je n’ai pas compris si les dialogues étaient une parodie
Ou vraiment travaillés
Ni sur le scenario était un vrai ou un de série B.
Peu de budget sur ce navet
Il n’était même pas doublé juste sous-titré.

Je me suis marrée en me voyant là
C’est ça ma vie cinématographique ?









dimanche 9 mars 2014

Du courage,



Il a fallu expliquer la Saint-Valentin. Plus que dire que c’est la fête des amoureux, il a fallu expliquer que ce jour-là dans l’année, on prend le temps de penser à ceux qu’on aime : à nos amours, à nos amitiés.
Mes petits gars avaient envie de faire quelque chose, chacun pour son amoureuse. Je leur ai proposé de leur faire un dessin, mais devant ce manque de créativité, ils se sont insurgés : « on a en a déjà fait». 
Clairement, la Saint Valentin telle que je l’avais expliquée méritait plus qu’un acte courant.Après un brainstorming familial, le cahier des charges se résumait ainsi :
  •       une forme de cœur
  •       confectionné soi même (a contrario d’acheté)
  •      joliment emballé.

Et la conclusion est vite tombée : des biscuits en forme de cœur.

J’ai du acheter les emporte-pièces ad hoc, car nous en avons toute une panoplie mais plutôt sur le thème de Noel (et encore parmi se trouvent un crocodile, un kangourou, un kiwi et une forme d’Australie…). Et le mercredi, cuisine, cuisson et décoration. Chaque biscuit est une objet unique, de perles de couleur, d’étoiles en sucre, de glaçage,…
Quelques pièces rangées dans un écrin (une boîte en carton), délicatement posée sur une serviette en papier (imprimés de Noel, je suis une mère indigne, je n’ai pas pensé à tous les détails).
L’écrin entouré d’un ruban (violet, c’est ce que j’avais de plus fille : « tu n’as pas des rubans cœurs ? » argh !), et décoré aussi de façon unique avec des gommettes de fleurs et de coeurs (ouf, j’en vais quelques uns), sans le moindre pirate, voiture ou monstre pourtant tentant en guise  de décorations.
Mes gars ravis de leur production qui vont se coucher avec des éclats dans les yeux, contents d’eux et de la promesse que ça porte.

Vendredi 14 février au matin, je vois arriver mon plus grand gars, la mine encore endormie dans la cuisine « je crois que je vais pas y arriver à lui donner la boîte ».
Je crois que je vois bien le problème. Je sens la crainte, l’angoisse, la peur, la difficulté et finalement la somme de courage que cela demande.

J’y ai pensé toute la journée et mon iMari aussi. A coup de iPhone, nous avons partagé nos interrogations et nos souhaits pour nos garçons avec leur boîte de biscuits.
Vont-ils y arriver ?
Cette boîte est si amoureusement décorée, confectionnée, elle porte à elle toute seule toutes les déclarations dont ils sont capables du haut de leurs (très) jeunes années. On s’inquiète en imaginant des filles pas très délicates, ce qui pourrait dévaster leurs relations aux filles pour les 20 ans qui viennent.
Les deux histoires se terminent bien. Le grand l’a fait donner par sa sœur, et a échangé des petits mots avec l’heureuse élue. Petits mots qui sont désormais rangés dans sa boîte à trésor.
Le petit a eu droit à un bisou, et il en a donné un en retour « vous m’aviez dit de le faire» et il s’étonnait que « son cœur battait très fort, comme quand il va à la piscine ».

Il s’agit bien de courage, il s’agit bien d’affronter sa peur.

Et nous en tant qu’adulte quand sommes nous courageux avec nos déclarations ?

L’année où j’ai habité Leeds (UK), j’ai apprécié la Saint Valentin pour la simplicité du protocole proposé : on donne une «Valentine’s » à ses amis, à ses amours.
Et finalement, c’est une belle déclaration ; à l’époque il ne s’agissait pas d’e-mail. Sa Valentine’s card  pouvait être achetée, confectionnée, confiée à la poste ou donnée en main propre.
C’était l’instant entre amis.

J’ai des amis que je traîne depuis longtemps, qui m’entraînent depuis longtemps. Que j’aime depuis longtemps. Mais à qui je n’envoie jamais de Valentine’s.

Je les reconnais facilement, c’est ceux avec qui je retrouve le fil de la conversation là où je l’ai laissé. Même si c’était il y a un an, voire 6, voire plus encore parfois.
C’est exactement à ça qu’on les reconnaît.
La vie nous chahute, elle nous trimballe d’un côté, de l’autre de la planète, d’un côté ou de l’autre des rêves qu’on avait faits.
Je ne suis pas la plus sédentaire d’entre tous, ni la plus connectée, ni la plus pendue à mon téléphone. Mes amis savent que j’écris bien plus que je ne téléphone, mais pas forcement de Valentine’s.

Et pourtant j’ai quelque chose du renard dans le Petit Prince, quand je vois les blés jaunes je pense à quelqu’un.
Je ne peux pas lire un bouquin sans penser à qui il plairait, écouter des musiques sans faire le lien avec certains, des situations en convoquent d’autres, une bière ou un sujet peuvent me ramener des années en arrière…

Vous vous reconnaissez. Ce billet est pour vous.

C’est ma Valentine’s, une forme d’ode à l’amitié qui ne dit pas son nom.

Devenir digne d’entrer au musée





Les photos de paparazzis s’affichent à Pompidou, et ça fait polémique.
Mazarine Pingeot la première s’en insurge. Jeunette et bleuette, elle raconte comment elle s’est faite avoir par le journaliste de Paris Match. Mais plus de vingt ans après, lâcher prise ne représenterait-il pas une forme paix avec elle même, son père et son histoire, reconnaissant que c’est une partie de la grande Histoire ? Et qu’en tant que telle, elle est au Musée.

J’ai croisé la mienne, d’histoire, au musée des Arts et Métiers, samedi dernier.

Après les salles consacrées aux sciences, aux chimistes et toutes ces découvertes qui revisitent tous nos cours d’ingénieur – et c’est parfois comme si je n’y avais jamais été – il y a une (grande) salle consacrée aux communications en général.
Les enfants se régalent de ces objets de « l’ancien temps » qui ont été toute notre enfance.

Les appareils photos Polaroid avec lesquelles mon oncle nous prenait et nous montrait dans la minute nos bouilles dorées par le soleil avec encore du sable dans les cheveux lors de nos vacances en Bretagne. Cela me semblait le comble de la modernité, j’avais une dizaine d’années.

Les premiers magnétophones à cassettes sur lesquelles on enregistrait à renfort de grandes technologies les disques que les copains nous prêtaient ou les chansons du top 50 quand elles passaient à la radio, en essayant tant bien que mal de couper les commentaires de l’animateur.

La machine à écrire sur laquelle j’ai tapé mon rapport de stage de 1ère année. Les plus technophiles d’entre nous (on en disait pas geek à l’époque) avaient un PC et certains même Windows, mais c’était réservé à une élite.

Le premier ordinateur un ZX81 que mon père avait acheté à l’époque. On n’en faisait pas grand chose. Branché sur la télévision noir et blanc,  on recopiait des programmes, puis en tapant 
« execute » on voyait s’afficher « bienvenue » à l’écran. C’était juste fantastique

Le téléphone Be Bop avec ses couleurs de bonbon acidulé, d’une réalité post- moderne. Il ne fonctionnait pas dans certaines rues de Paris car « la borne était trop loin ». Impensable aujourd’hui.

Je ne parle pas de postes de télévision plus profonds que larges, ni des projecteurs de cinéma où il fallait changer la bobine au milieu du film. Nous allions au ciné club et c’était la fête.

Toute cette salle tient dans mon iPhone. Et encore bien plus dans celui de mon iMari.
Quand est ce que nous serons aussi une pièce de musée ?