vendredi 20 février 2015

Il y a des stations où


le dernier des oeufs (juste après les Mohicans)
  • on paye des agences de communication une fortune pour expliquer que certaines pistes ne sont pas damées
  • les remontées sont au nombre de 101 et 22 dameuses travaillent pour nous la nuit, nous informe-t-on au fil des pentes
  •  on éduque le skieur qui prend le télésiège avec des stickers collés sur les barres de protection: « un bouquetin est plus épais à l’encolure qu’un chamois, de même ses cornes sont plus grandes et plus épaisses », « qui marche dans la neige ne peut effacer ses traces – proverbe chinois » (ou connerie qu’on veut élever au rang de sagesse)
  •  les anglais essaient d’enfiler leurs skis dans les casiers des œufs par les spatules (forcement ça ne marche pas, il prend l’œuf d’après)
  • il y a encore des œufs (peut être une des dernières stations à avoir ces équipements du siècle dernier)
  •  on rencontre des femmes qui prennent les pistes à la montée (l’histoire ne dit pas si elles sont anglaises et avec le mec qui met ses skis à l’envers dans les œufs)
  •  le nom de la station ne correspond à aucun village et on peut chercher le départ des heures (voire des jours)
  • en fin de journée, on termine dans un bar blindé de moniteurs avant la descente aux flambeaux, qui sert de la Guinness à la pression et qu’on sirote en lisant Elle Magazine
  • on enchaîne par le spa de l’hôtel, jacuzzi, sauna, douche froide, piscine et on recommence, en terminant plusieurs cycles par un massage
  • les fauteuils du bar de l’hôtel sont en de cornes de vaches (imitation mais quand même), il y a des têtes de taureau dans la salle à manger et des tabourets en peau de vaches dans les chambres.


Et c’est le bonheur de 2 jours de grand ski, avec mon iMari (il y a du wifi sur les pistes, juste pour lui).
Quand ça s’arrête nos jambes ont besoin d’arnica, nos visages de crème après soleil, et nous de repos.
Jusqu’à l’année prochaine.


mercredi 18 février 2015

Classique

Elena Chernychova - Norlisk
"on réussit bien mieux à contempler la vie quand on la regarde par une seule fenêtre"

L'avantage (the great benefit) des vacances  - s'il était besoin d'en trouver, de les citer, de les ordonner... - est de (re)lire les classiques.
Dans la maison de mon père, qui est celle d'une lignée d'hommes du même nom et dont le prénom alternait d'une génération à l'autre, il reste mes livres d'enfants au grand bonheur des miens et mes livres d'ado mélangés avec les classiques dont la lecture fut imposée par le parcours scolaire (ou pas en ce qui me concerne).
Ils sont rangés sans ordre ni méthode dans la chambre que j'occupe adulte aujourd'hui. Ce n'est plus ma chambre d'avant, mais ce sont mes livres d'avant, transbahutés là dans un désordre si peu calculé qui permet le vagabondage dans les étagères.
Et en chemin j'ai rencontré "the great gatsby" de Fitzgerald (je n'ai d'ailleurs pas vu le film récemment sorti).
Je l'ai ouvert, en ai (re)lu les premières phrases, puis pages. 
C'est comme si c'était une première fois. 
Ou est ce que le revoir avec des années de plus, j'en comprend plus ou différemment? 
Comme si soudain un voile se levait sur un sens qui semblait inaccessible 25 ans auparavant.

"Quand j'étais plus jeune, ce qui veut dire plus vulnérable, mon père me donna ce conseil que je ne cesse de retourner dans mon esprit :
"quand tu auras envie de critiquer quelqu'un, songe que tout le monde n'a pas joui des mêmes avantages que toi"
(...)
Reserver son jugement implique un espoir infini. J'aurais encore un peu peur de rater quelque chose si j'oubliais, comme le suggérait mon père avec snobisme, et comme avec snobisme je le répète ici, que le sentiment des décences fondamentales nous est reparti en naissant d'une manière inégale.
Or ayant ainsi fait étalage de tolérance, j'en viens à l'aveu que le mienne a ses limites".

La mienne aussi, tous les jours, en toutes circonstances. 
Je mesure son accroissement avec les années, mais sa marge de progression me semble infinie. 
J'ai un ami coach qui a nommé sa société "incredible mankind", et souvent je me le répète comme un leitmotiv quand je m'emporte sur des gens qui (me) semblent ne pas bouger alors que la situation l'imposerait.
Je ne sais pas si j'ai joui de plus d'avantages que d'autres, mais je me suis posée plus souvent des questions c'est sûr, et je m'en pose encore beaucoup. Parfois trop.

"après tout on réussit bien mieux à contempler la vie quand on la regarde d'une seule fenetre" 
dit toujours le narrateur dans Gatsby le Magnifique.

Au dessus des nuages

Ici, tout n'est que calme, luxe et volupté?
Pas tout à fait, il y a quelques noeuds aussi
Et des indications
Voire des directions
pour se diriger dans le brouillard
aller toujours plus haut
vers la lumière
Au dessus des nuages
  
seuls au monde (?)

pas tout à fait
mais en profiter quand même
Aussi loin que porte le regard
version LSD

Ecouter le bruit de l'eau...
et avoir envie de faire pipi!




et mes nouveaux skis
bien en dessous des nuages








lundi 16 février 2015

Balade en hiver

A l'angle du jardin des tuileries 


1, 2, 3 vers le ciel

Le jeu de Paume



En haut de l'escalier

Un jardin en hiver

iMari sous un lion en hiver

Des promesses...

Vous n'avez qu'à bien vous tenir

Rêver


Boire, sans risque, avec délice

Ca va s’arrêter, ça doit s’arrêter,

Shane Lavalette - Bird choir in Austin (from the New Yorker)



Il y a la pyramide de Maslow, le théorème de Pythagore, la loi de Murphy, le principe de Peter, et quelque chose qui ne semble s’apparenter à aucune loi, mais on aimerait bien.
On aimerait bien surtout que ça s’arrête.

Ca a commencé pour moi un vendredi où j’avais réussi à poser un jour de congés.
J’avais rendez-vous le matin pour faire enlever le plâtre de mon fils. Pas un vrai plâtre, une résine. Sur la route, je me suis dit que peut être il fallait évoquer l’éventualité qu’il ne reparte pas sur ses deux pieds, mais avec une nouvelle résine. Il a négocié alors de se laver uniquement un jour sur deux.
Il a été malin, car il est sorti avec une nouvelle résine au pied droit pour 2 semaines.
Déçus, on s’est tous les deux remonté le moral en regardant des albums photos toute la matinée, car l’école ne prend pas les élèves quand ils arrivent trop tard. Et on paie pour ça, c’est une école privée.
Dans l’après midi, j’ai été appelée par le bureau. Je savais que c’était plutôt un problème car ils ne me dérangent pas quand j’annonce clairement que j’ai un jour off.
La conf call du vendredi soir à 18h était déprimante. Une de mes clientes est arrêtée pour un mois. Un nouveau burn-out, 6 mois après le premier. Ca s’annonce mal.
Son chef est désorienté, avec le sentiment d’être trahi.
Mon week-end est en l’air. A part retourner dans tous les sens, ce que j’avais fait, pas fait, aurais pu faire aurais du faire… je n’ai pas trouvé de repos. Je ne suis pas un super héros. Je l’écris à longueur de ces pages, et je désespère de ma condition humaine. Je me heurte à mes limites, je rage sur mon impuissance.
La semaine qui suit, je me sens « en convalescence », comme si c’était moi qui était malade.
Cette même semaine, je loupe mon train. Pour Roanne. Et pourtant j’avais motivé le taxi, il a même grillé un feu rouge. Mais la gare de Vaise (à Lyon) est une gare de quartier, petite et mal indiquée.
4 quais, et les trains pas annoncés sur grand écran.
J’ai hésité, je suis montée sur le mauvais quai
et j’ai vu mon train,
le TER rhône alpin, quitter la gare sur l’autre quai.
Je n’y croyais pas : ça ne pouvait pas m’arriver à moi.
Dans les films, il y a un homme qui apparaît derrière et l’histoire finit bien.
Dans ma vie à moi, ce jour là, je suis tombée en rade de batterie de téléphone.
Et il n’y avait pas de ligne de taxi devant la gare.
Et je n’avais pas de monnaie pour prendre le métro.
Le bon côté de choses, je suis rentrée plus tôt à la maison. Accueillie par la gastro du petit dernier.
Une nuit d’enfer, la journée du lendemain à la maison, en annulant tous mes rendez-vous et en menant une partie de mes réunions au téléphone sur fond de Barbapapa en boucle à la télé.
Le lendemain j’ai fait un flop dans un comité de direction. J’ai présenté un dispositif que personne n’a compris. Grand moment de solitude. Je suis repartie tout ébranlée de mettre prise les pieds dans le tapis, envoyant les textos à l’équipe pour ventiler, j’en ai oublié mon gant dans le taxi.
Ce même après midi, j’ai versé du café dans ma tasse de thé avec mon sachet.
J’ai pensé très fort à ma collègue, qui quand elle a des séries comme ça se dit « quand mon paquet de lessive sera terminé, ça s’arrête ». La différence est que moi, j’ai un paquet de lessive format familial.
Dans la suite, celui avec son plâtre (en résine) au pied a fait un rhume de hanche et ne pouvait plus du tout marcher.
Une cliente a fait une crise de panique.
Le pneu arrière de mon scooter était à plat.
Et mon paquet de lessive n’est toujours pas terminé.



samedi 7 février 2015

Suis-je Charlie?


Oops! mais qui est Charlie?
Je connaissais Cabu parce qu’enfant je regardais Recré A2 où il croquait le nez en trompette de Dorothée, et que mon père regardait Droit de Réponse le samedi soir et que moi j’avais le droit de veiller un peu.
Mes parents ont longtemps été abonnés au Nouvel Observateur et donc je connaissais aussi Wolinski. Mais il y avait trop de boules et de petits points partout pour que j’apprécie vraiment ses dessins et donc je n’ai jamais lu de mon plein gré ses albums.
J’écoute France Inter depuis des années, et je connaissais aussi Bernard Maris

Je les connaissais. Mais, je n’ai jamais acheté Charlie Hebdo.

Je ne comprenais pas toutes les blagues qu’ils faisaient, et parfois les unes de Charlie me laissaient perplexe je n’avais pas tous les codes, toute la connaissance ou l’intelligence qu’il fallait pour les comprendre à leur juste valeur.
Je n’ai pas mis de bougie à ma fenêtre le mercredi soir, ni envoyé de SMS #JeSuisCharlie, ni suis allée défiler Place de la République (ou me « poser » car on ne pouvait pas bouger m’ont dit ceux qui y sont allés).
Et pourtant, je ne suis pas insensible. Je suis d’accord avec Voltaire mais je ne suis pas aller défiler ce dimanche là.
Je n’ai pas acheté non plus le « tout est pardonné » ensuite. J’en avais l’intention et on m’a décrit quelques dessins. Je n’avais ni envie de les voir, ni de les avoir chez moi, comment j’aurai expliqué à mes enfants que c’était ça la liberté de la presse ? Je ne comprends pas même les messages sous jacents.
Comment expliquer que provoquer c’est aussi un droit ? Que ne pas respecter la sensibilité c’est aussi un droit ? Et qu’il n’y a rien qui donne le droit non plus de tuer quelqu’un, quelles que soient ses idées et ce qu’il dit ?
Voltaire a beaucoup été cité ces derniers temps « je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous ayez le droit de le dire ».
On dit aussi que l’Islam est une religion moins évoluée ou moins ouverte que les autres (et quand les Cathos défilent contre le mariage pour tous, c'est évolué?) et que donc les musulmans intégristes ont du mal à prendre du recul quand on se moque de Mahomet. 
Rien que ça, est ce que ce n’est pas déjà un jugement ?
Est ce que ce moquer c’est un droit ? Est ce que offenser c’est un droit ? Oui certainement.
Et j’ai moi le doit de ne pas être d’accord avec ça, de passer mon chemin. 
Même quand c’est de moi qu’on se moque et qu’on offense ?
Et certainement, je ne paie pas des cagoulés pour aller régler ces comptes là.

Tout cela me semble bien complexe.
Et je ne suis toujours pas sûre que se moquer et provoquer font avancer les choses, c’est à dire la tolérance, l’ouverture, l’attention à l'autre qui permettrait à un moment d’essayer de se rencontrer voire de se comprendre.
Tuer non plus, me direz-vous.

Je ne sais pas toujours pas si je suis Charlie.
Je suis déjà moi avec mes idées un peu embrouillées.
Et c’est le travail d’une vie.