dimanche 11 février 2018

Seulette

Chateau de Tanlay

Seulette suis et seulette veux être,
Seulette m'a mon doux ami laissée,
Seulette suis, sans compagnon ni maître,
Seulette suis, dolent er courroucée
Seulette suis, en langueur malaisée,
Seulette suis, plus que nulle autre égarée,
Seulette suis, sans ami demeurée

Christine de Pisan (14ém siècle), extrait de Voix de femmes
Anthologie, poèmes et photographies du monde entier

Hésitations

A la maison Doisneau

J'y vais ou j'y vais pas?
J'hésite. Séparer l'oeuvre de  l'homme. 
Est-ce possible?
Aller voir Wonder Wheel de Woody Allen?
Je suis un aficionados de Woody. Je les ai tous vus, voire revus (Meurtre mystérieux à Manhattan, Manhattan,  Annie Hall...). J'ai même aimé les moins bons, en partie par habitude, en partie pas loyauté, une sorte de fidélité aveugle.
Mais là, j'hésite.
Il n'est pas dans le coeur de la tourmente, juste pas loin. Avec les affaires sur sa fille adoptive, pas celle qu'il a épousé, celle dont il aurait abusé. Dylan Farrow.
Et d'ailleurs que dire d'une homme qui épouse la fille adoptive de sa compagne?
Pourtant, ses films ne le mettent pas en valeur, pas un homme de pouvoir, plutôt un homme de névroses. Un homme à faire n'importe quoi, aussi en matière de coucheries, à consommer des psy comme moi du chocolat. Je ne sais pas lequel est mieux. 

Je ne suis pas imperméable à la vie des gens. Je sais aussi qu'on ne peut pas réduire quelqu'un à ce qu'il a fait. 
Je n'ai plus écouté Carla Bruni une fois qu'elle a épousé Sarkozy, j'écoute moins Noir Désir et plus du tout Cantat depuis 2003, et sans être choquée je suis dérangée de le voir en couverture des Inrocks récemment. 
Alors, est ce que y aller c'est fermer yeux? c'est s'accommoder? c'est supporter? ou c'est faire preuve de discernement?
L'homme peut il être différencié de son oeuvre? 
Certains disent que c'est ma névrose non résolu qui crée l'artiste. Quid de la perversité?
C'est une question d'éthique pour moi, mais je ne suis pas certaine de la mettre au bon endroit.


Je ne sais pas.
Je vous tiens au courant.

vendredi 9 février 2018

La resignation arctique

Rer b, derrière chez nous

"Une baisse de tension générale. Du ciment dans les membres. Depuis j’ai lu des choses à propros du renne norvégien qui, l’hiver refuse d’avancer. On appelle ça la résignation arctique."

Imagine que je sois parti – Adam Haslett

Je comprends mieux ce que j'ai eu cette semaine. C'est un nom savant.
C'est la faut de la neige. 
Peut être un peu de la fièvre. Mais la neige surtout. 
Et le froid. Presque arctique.
Je suis restée au fond de mon canapé.
J'ai refusé d'avancer, comme le renne norvégien.
Dieu que c'est agréable, parce qu'à la différence du renne, je suis sous mes couvertures  : une canadienne, une galloise et une écossaise.

J'ai de la dignité


white bamboos

Retour du ciel bleu par dessus les toits.
Après une semaine de quarantaine, de vie au ralenti, de sortie de routine.

Ah, la neige à Paris, c'est beau, romantique et ça nous sort du quotidien.

Le iMari a fait du télétravail toute la semaine. Au 2ème jour, j'avais l'impression d'avoir un lion en cage, qui sortait toutes les deux heures prendre l'air et rentrait en grognant "il fait froid! ça caille".
Quel scoop, c'est pour ça que tu télétravailles.

Mardi je suis allée en scooter au bureau et depuis il est resté dans le 11ème. J'espère qu'il n'a pas trop froid, qu'il n'a pas peur et qu'il ne s'ennuie pas trop.
L'esplanade de la Défense était une piste de ski, comme dans les Rocheuses avec le blizzard Canadien. Au 40ème étage de la tour, une douceur grise nous enveloppait, nous étions dans l'espace, je titubais de fièvre. Le matin j'avais trop froid, puis trop chaud, puis les mains gelées et la tête brulante en râlant contre les clim' de ces tours de la Défénse. J'avais juste de la fièvre. 
Dans la panique de la tempête de neige, de mon état fébrile, j'ai annulé le concert où j'étais invitée (le philharmonique de l'Ile Seguin, zut). D'abord en restant plantée au pied de la tour un peu trop longtemps dans la neige entre me disant il faut que je rentre, je veux être dans mon lit, et sans trouver le courage d'avancer. Dans une état second. Coincée. Bloquée. Plantée.
RER bondé, normal avec la neige, ils ont tous abandonné leur véhicule. J'avais très envie de vomir, ce que j'aurai bien fait sur les gens qui me serraient, m'enfonçaient un coude dans les côtes, m'écrasaient un pied, me mettaient leur musique dans le nez et leur odeur dans les oreilles (ou le contraire). J'ai tenu bond, et pourtant ça m'aurait amusée de leur vomir dessus et accessoirement me prodiguer un cordon de sécurité.
Mercredi, neige à flots, fond de canapé, entre fièvre et courbatures. Les activités des enfants ont été annulées pour moitié et l'autre nous avons eu la flemme.
Jeudi, beau verglas, trottoir patinoire. Ecole fermée. Sortie pour un rendez vous avec un Suisse en anglais chez des avocats, courbatures mais plus de fièvre. Fond de canapé après le déjeuner.
Vendredi, neige, neige, neige sur le verglas de la veille. Le collège ferme à midi et l'école appelle pour évacuer les élèves. Sorties dans la neige entre deux sessions fond-de-canapé.
Neige, vent et bataille de boule de neige  "j'ai de la dignité, je prends pas la neige sur les poubelles" dit mon iFille.