samedi 9 février 2019

On n'échappe pas aux clichés

Irene Jacob - Retour à Reims au Théâtre de la Ville

Notre abonnement au Théâtre de la Ville nous a amené voir la pièce "Retour à Reims", qui s'est trouvé faire le buzz. En juin, au moment du choix je savais à peine ce que j'allais voir, je suivais les conseils d'un collègue.
Retour à Reims de Didier Eribon, un ouvrage sociologique, qui ne se lit pas comme un roman, loin de là. Je n'ai pas lu Eribon, j'ai compris tout son propos en allant voir la pièce, en gros c'est ce que j'ai retenu de Bourdieu (les classes sociales) croisé avec Foucault (l'homosexualité).

La mise en scène est habile, en double jeu : on assiste à la lecture et mise en images du livre... 
Ça nous épargne les déambulations sans fin de Eribon dans les rues du lotissement de ses parents, ou ses allers-retours en train entre Paris et Reims. Des images du film (oui il y aussi eu un film) sont d'ailleurs projetées en illustration du texte lu par Irène Jacob.

Irène Jacob. Vous vous souvenez ? Rouge, la Double Vie de Véronique. 
C'est la même. La même présence, la même voix chaude et enveloppante. La même avec quelques années de plus. Comme nous. Non, pas exactement comme nous, mieux que nous.
Le texte est remarquablement mis en valeur, une voix de femme sur une autobiographie masculine donne une autre dimension, on oublie aussitôt que c'est une femme qui porte l'histoire d'un homme.
Toute la première partie est captivante, jusqu'à ce que le metteur en scène - le fameux Thomas Ostermeier - se dise qu'il faut qu'il se sorte des clichés.
L'actrice est une femme blanche, une intellectuelle, le metteur en scène est un intello gaucho blanc et le gars qui leur loue le studio d'enregistrement est un grand black. 
Le metteur en scène a voulu montré que l'homme blanc n'est pas un donneur de leçon à la femme, c'est la femme qui a raison quand il s'agit de sublimer le texte. Il lui dit même "ah je te fais du mansplaining" et explique ce qu'est le mansplaining! C'est fou.

Il a voulu montrer que même quand on est black et qu'on habite en banlieue (la femme se plaint de devoir faire une heure de bus pour y arriver depuis Paris) on sait faire des choses : on a droit à deux chansons Rap (peut-on parler de chanson quand c'est du rap?), il est "chef d'entreprise , le studio lui appartient il nous le rabâche. Et surtout il est intégré, la preuve : son grand père était un tireur sénégalais.
La pièce s'égare un peu sur l'histoire des tireurs sénégalais, ces "vrais français de couleur", sur le rap, sur le faux interêt que montrent les deux intellos français à leur pote black.
Et au milieu de tout cela des images des gilets jaunes. Le metteur en scène cherche à rentrer dans l'histoire du théâtre en étant le premier à porter à 'écran les Gilets Jaunes?

A trop vouloir combattre les stéréotypes que l'on porte en soi, on se noie dans les clichés.
Moi c'est le moment où je me suis perdue, j'ai piqué un petit somme.

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